Meurt célibataire.
" Lettre de Mesdames Marie, Adélaïde et Victoire, tantes du roi Louis XVI, au chevalier de Lattre, (30 août 1794.
Mesdames Marie, Adélaïde et Victoire de France, tantes du Roi, ayant résolu de sortir de France, avaient obtenu des passé-ports pour se rendre à Rome. Elles se préparaient à partir, quelques jours plus tard. lorqu'on vint leur annoncer, dans la soirée du 19 février 1791, que le peuple de Paris voulait s'opposer à leur départ et qu'une bande nombreuse allait venir les arrêter à leur château de Bellevue. Elles montèrent aussitôt en voiture, à dix heures du soir, sans attendre leur suite, qui fut en effet, quelques instants plus tard, arrêtée à Sèvres, et, tournant Paris, gagnèrent Fontainebleau', où un détachement du régiment des chasseurs du Hainault, qui tenait garnison en cette ville, monta à cheval pour escorter leur voiture à travers la forêt jusqu'à Morot. L'arrivée de Mesdames y souleva une émotion populaire dans cette petite ville dont les portes furent fermées pour empêcher leur voiture de continuer sa route. M. de Carbonnel, capitaine aux chasseurs du Hainault, qui commandait l'escorte, en imposa à la populace par la fermeté de sa contenance, fit rouvrir les portes et assura le départ de Mesdames2.
M. de Carbonnel était accompagné d'un autre officier de son régiment, le chevalier de Lattre3, qui s'était joint à lui pour essayer de calmer le peuple et protéger la voiture des princesses jusqu'à ce qu'elle fut
1 Lettre inédite de M. Delalande, député du Maine à l'Assemblée nationale constituante à M. Dupont Grandjardin, juge criminel à Mayenne : « Paris, << le 21 février 1791. Tu verras, mon ami, par lettre du roy à l'Assemblée << nationale d'hier que nos tantines ont voulu partir absolument, avant<< hier soir, à dix heures. Les chevaux qui les ont conduittes à Fontainebleau << sont déjà de retour. On m'a dit, hier soir, que les gardes nationales de << Sèvres n'avoient pas voullu laisser sortir leurs carrosses de suitte; que les Dragons qui sont au quartier de Versailles ayant voullu leur forcer la << main ; ils leur avoient présenté leurs bayonnettes au ventre pour réponse « et que les voitures et les gens de leur suitte étoient restés là. » << De nos archives).
2 Relation du voyage de Mesdames, tantes du Roi, depuis leur départ de Caserte, jusqu'à leur arrivée à Trieste, écrite par M. le comte de Chastellux et publiée par son fils Paris, Michaud, 1816, in-8° Avant-propos de l'éditeur, page 10. Lettre de M. de Ségur, colonel du régiment de Hainault, au président de l'Assemblée nationale, lue dans la séance du 1er mars est reproduite dans le Journal des Débats et Décrets, no 635, du 2 mars 1791; Journal le Moniteur universel, no 53, 55, 56 et 63 des 22, 24, 25 février et 4 inarз 1791.
3 Nous n'avons cependant pas rencontré le nom du chevalier de Lattre parmi ceux des officiers du régiment des chasseurs du Hainault dans l'Etat militaire de la France, de 1791.
sortie de Moret. Cet officier émigra quelque temps après et prit du service dans l'armée des Princes; le 30 août 1794, Mesdames, qui sans doute avaient ignoré jusque là ce qu'il était devenu, ayant appris qu'il se trouvait à ce moment à l'armée de Condé, lui adressaient la lettre suivante que nous reproduisons d'après une copie que nous avons sous les yeux. Cette copie, écrite en 1817 par le chevalier de Lattre, certifiée par lui et ensuite par le maire de Saint-Omer, M. Enlart, dont la signature a été légalisée à la sous-préfecture de cette ville, nous parait présenter un caractère d'authenticité indiscutable'.
Copie de la lettre des Augustes Princesses, Mesdames Marie, Adélaïde, Victoire, tantes du Roi, à M. Philippe Eustache de Lattre, capitaine au régiment des chasseurs à cheval du Hainault.
Nous venons d'apprendre avec une extrême satisfaction. Monsieur, que vous avez pu sortir de France; et que vous servez présentement dans l'armée de M. le prince de Condé, après avoir fait la campagne de 1792 dans l'armée des Princes, nos
neveux.
Nous nous empressons de vous faire parvenir les assurances du souvenir que nous conservons du service que vous nous avez rendu par le zèle et la prudence avec lesquels vous avez, de concert avec M. de Carbonnel, assuré notre sortie de Moret. Nous regretterions de n'avoir pu vous exprimer plutôt votre sensibilité et nous désirons que ce témoignage, que nous vous rendons avec plaisir, vous soit à jamais un gage de notre estime et de notre intérêt.
MARIE, ADELAÏDE,
VICTOIRE.
A Rome ce 30 août 1794.
Pour copie conforme à l'original resté entre ses mains. Le chevalier DE LATTRE, pensionné colonnel de cavalerie. Collationné et trouvé conforme à la minute à nous représentée et rendue par nous, Maire par intérim de la ville de Saint-Omer, le deux octobre 1817, ENLART.
L'original de cette lettre, doit sans doute exister encore dans les Archives de la famille de Lattre, originaire du département du Pas-de-Calais.
Vu par nous Sous-Préfet de l'arrondissement de Saint-Omer pour valoir légalisation de la signature de M. Enlart, Maire" source Revue de la révolution, Volume 16, p 42
Philippe Eustache de Lattre |